Brume

[Salon bleu]

Dans le couloir de l'Aile Est, le vicomte broyait du noir. Il était encore trop tôt pour mettre de l'ordre dans ses idées et prendre une décision. Après tant d'années sans le moindre changement, tout venait de lui tomber sur les épaules. Son ancienne plaie lui semblait béante. Des souvenirs de la fin de sa vie lui venaient et il les repoussait les uns après les autres. Il n'avait de prise sur rien, tout lui échappait. La seule chose réelle qu'il pouvait créer, c'était ce brouillard étrange qui commençait sérieusement à s'accumuler autour de lui. Il fallait qu'il change de pièce.

Il se glissa au travers d' un mur de pierre épais, mais au lieu de simplement en sortir, il resta un moment immobile, au creux de la roche. De cette façon il était un peu mélangé à un élément, comme Diane dans l'eau du lac. Il venait de trouver l'endroit idéal pour méditer un moment.

(à suivre...)

[HRP : Tu ne veux plus jouer ?]

[HRP : ah non c'est pas ça du tout, pas de panique ^^ j'ai encore des idées. Je continue dans deux jours, c'est juste que j'ai du boulot là ]

[HRP : Ok merci j'ai eu peur. Quand tu reviendras, previens moi, on pourra faire un petit topic ensemble (je prendrais le compte de Clémence)]

Quelles différences entre être dans la pierre ou à l'air libre ? D'abord, la noirceur était parfaite. Il lui semblait qu'il n'avait jamais connu une telle absence de lumière. De ce fait, il pouvait imaginer sans mal que les dimensions de cet endroit ne se limitaient pas à la largeur du mur, qu’il était infini. Ensuite, malgré l'absence de sensations, il pouvait percevoir la densité de la roche : ses mouvements étaient extrêmement ralentis et il n'était plus certain d'être encore dans la posture horizontale.
Charles imagina sa Diane en train de faire les mêmes découvertes que lui. Sans doute avait-elle prit du plaisir à évoluer dans l'eau, un monde de silence parfait et de ténèbres, l'eau stagnante du lac était en effet loin d'être claire. Mais il y avait encore une marge avant de se retrouver dans la même situation qu'elle : il était toujours une entité complète et il n'arrivait même pas à imaginer comment il pourrait en être autrement.

Il ferma les yeux pour échapper un moment au malaise que commençait à lui inspirer cet espace étrange, et réfléchit à ce qu'il allait faire.

La solution la plus honorable aurait été de prendre la décision de s'entraîner encore et encore jusqu'à être capable de broyer la duchesse de ses propres mains. L'ennui, c'était qu’une telle entreprise lui prendrait mille ans au bas mot, en admettant que le pouvoir de la duchesse n'évolue pas trop pendant ce laps de temps. D'ici-là le château pourrait bien être détruit et le lac asséché... Sa vengeance, il la voulait dans les plus brefs délais, et qu'elle soit éclatante. Alors il pourrait aller au lac et annoncer à son épouse que son bourreau avait payé. Qu'on se moque de sa manière de penser si proche des vivants, il n'était pas encore un de ces fantômes séniles pour qui le temps n'a plus d'importance.

Il voulait voir si l'esprit de Diane existait encore, si le retour était possible. Plus il attendait, plus il savait que cet espoir devenait vain.

Alors, l'unique solution qui s'offrait à lui était de réunir tous les fantômes qui éprouvaient le même désir de vengeance à l’égard de la duchesse. Former un groupe de mercenaires puissants et se joindre à eux pour l'accomplir. Faire connaître à cette femme une douleur bien réelle et à la mesure de ses actes passés.

Et la personne qu'il devait rencontrer en tout premier lieu était la première d'entre tous, Clémence de Faussigny.

Il ouvrit les yeux et s'échappa du mur avec hâte. De son vivant, il avait été assez amorphe pour laisser son malheur se forger sous ses yeux sans lever le petit doigt. Il ne commettrait plus jamais le même pêcher. La lumière des candélabres lui parvint vivement et il se sentit plus léger et rapide que jamais. Sans attendre, il prit la direction de la roseraie, l'endroit où la rumeur prétendait qu'on avait le plus de chances de croiser la dame du château.

[La Roseraie]